L'aventure Ten Years After n'est pas terminée mais il était grand temps de fermer le dossier. J'ai refait ce Baistophe au lendemain du décès d'Alvin Lee, l'an dernier. Ça été un choc terrible pour moi. Même si son actualité avait atteint les larges arrières-plans, Alvin avait représenté tant pour moi et sa mort a procuré en moi une vive émotion, bien plus encore que celle de Jon Lord ou de Ronnie James Dio. Même si, aujourd'hui, Ten Years After continue de tourner sans Alvin, ce groupe lui doit tout, car il en était l'attraction centrale.
Ten Years After était un des premiers groupes auxquels je me suis attardé. À l'époque, numéroté 032, la compilation originale n'était pas ratée, mais elle était imparfaite, en plusieurs points. Tout d'abord, j'en étais à mes premiers balbutiements et mon Baistophe, aussi passionné soit-il, était le résultat d'un amateurisme certain. Le choix des titres, certes, était très bon (et assez proche de celui-ci) mais le choix de l'évolution chronologique n'en faisait pas quelque chose de particulièrement nouveau. Par ailleurs le choix du titre de la compilation et l'élaboration de la pochette étaient on ne peut plus maladroits. Peu de choix dans les photos, pas d'inspiration dans le titre (même quand, comme c'était le cas quand on ne trouvait pas, il fallait piocher dans les titres sélectionnés), bref, le Baistophe Ten Years After était probablement le premier pour lequel j'ai été particulièrement insatisfait.
Pour ce Baistophe-ci, le choix du titre a été bien plus facile à trouver. J'ai en effet choisi le titre d'un morceau sélectionné (et qui ne l'était pas à l'époque du vieux blog). Un titre qui collait parfaitement à Alvin Lee. Tout le monde connait aujourd'hui sa rapidité de jeu. C'était pour moi comme une évidence. Il m'a donc suffit de trouver les images adéquates pour coller au titre...
La carrière - la première - de TYA a été très courte : de 1967 à 1974. Après, les reformations éphémères se sont multipliées : en 1983 d'abord au festival de Reading, puis en 1989 où le groupe a même enregistré un album, et enchainé sur une tournée qui a abouti sur un album live l'année suivante. Après cela, Lee ne retrouvera jamais les trois autres membres du groupe. Son caractère avait toujours été difficile. Fieffé bagarreur, il avait toujours été la cause des splits. Pour nous, la vie de TYA s'est terminé avec son ultime départ. Même l'arrivé du jeune Joe Gooch avait laissé perplexe. Pourtant, pour avoir assisté à un concert de cette dernière formation, j'ai été bluffé. Gooch n'a pas tenté d'imiter son prédécesseur et pourtant, il a parfaitement remplit la tache et le vide laissé, y compris en jouant les titres du glorieux passé du groupe, composés avant même sa naissance !
L'histoire de Ten Years After est-elle belle et bien terminée ? Ce n'est franchement pas certain. D'autres albums, même studio sont envisageable. Néanmoins, au regard de ce qui a été enregistré avec Joe Gooch, malgré tout le talent des 4 membres actuels, et tout l'intérêt que peuvent apporter leurs compositions, trop peu de titres ressortent de façon aussi marquantes que ceux enregistrés lors de leur premier septennat. Il y aura donc probablement d'autres albums du groupe (2 ? 3 ?) mais il est fort à parier que cela n'implique pas une modification majeure à ce Baistophe. C'est pourquoi j'ai décidé de boucler le dossier TYA.
LES TITRES
CD I
1. Good Morning Little Schoolgirl
Issu de Ssssh (1969)
Comment commencer mieux qu'avec Good Morning Little Schoolgirl ? Certes, ce n'est pas un titre original du groupe mais, d'une part, l'interprétation y est très personnelle et fort bien aboutie, mais aussi ce titre apparaîtra longtemps dans les setlist de leurs concerts. Pour le bienfait de ce Baistophe, il m'a fallu allonger le titre à son début en lui ajoutant la fin du titre précédent sur l'album Ssssh et en lui mettant un fade in.
2. No Title
Issu de Stonedhenge (1968)
No Title est un titre méconnu et pourtant, il est d'une richesse assez impressionnante. Sorte d'exercice de style, autour d'un même thème, trois, quatre atmosphères sont développées. L'ensemble même du titre, dans sa totalité, est d'une parfaite cohérence.
3. Portable People
Single issu de Alvin Lee & Co. (1972)
Alors que Ten Years After explose réellement avec les albums Cricklewood Green et surtout A Space In Time (tous deux sortis chez Chrysalis), Deram, sentant qu'ils ont laissé s'échapper un réel talent à la fin 1968, tente de surfer sur la vague du succès du groupe en sortant une compilation de titres inédits tous dignes d'un intérêt certain. Portable People a beau être un titre accessible dans l'immédiat, sa légèreté et sa simplicité sont d'une parfaite efficacité, comme c'est souvent le cas de titres similaires écrits par Alvin Lee (on le verra plus tard)
4. Hard Monkeys
Issu de A Space In Time (1971)
Un titres aux sonorités champêtres, estivales, et pourtant bien enlevé. Une des nombreuses preuves que TYA savait ne pas composer de titre monolithiques...
5. She Lies In The Morning
Issu de Watt (1970)
Un titre pas forcément des plus marquants, mais qui témoigne de l'incroyable qualité de jeu de Ric Lee, à la batterie, même sur des constructions aussi classiques que celle-ci. L'intermède Jazzy, quoiqu'assez déstabilisant, est bienvenu par l'originalité qu'il apporte au morceau.
6. Convention Prevention
Issu de Rock'n'Roll Music To The World (1972)
Étonnamment écarté de la période dorée du groupe, R'n'R Music To The World est pour moi un des meilleurs albums du groupes et probablement mon favori (c'est pas celui-ci que j'ai découvert le groupe). À écouter cet album, ainsi que ce titres, on sent que la ferveur Rock'n'Roll a tendance à s'édulcorer (mais pas tant que ça en fait, si on y regarde à deux fois). On constate justement, au regard de ce titre, et de nombre de titres sélectionnés pour cette compilation que Ten Years After était un excellent groupe de Rock'n'Roll, certes, mais était probablement, et surtout, un bien meilleur groupe de Pop-Rock (dans un sens non péjoratif du terme). À penser que c'est complètement incompréhensible qu'un tel groupe n'ait pas eu plus de succès commercial !
7. She Keeps Walking
Issu de Evolution (2008)
Premier titre de la période Gooch. On sent ici que le groupe s'est centré sur une identité plus Blues Rock; somme toute moderne, et n'ayant pas tant à envier à quelqu'un comme Joe Bonamassa...
8. Goin' To Chicago
Issu de About Time (1989)
On atteint le gros creux de la vague. About Time est incontestablement le moins bon album du groupe. Créativité en berne et batterie électronique prédominante sur la plupart des titres (années 80 obligent). J'ai néanmoins réussi à sauver ce titre qui ne souffre pas de sa date de gestation, ni de la technologie qui était coutumière à l'époque. Certes, c'est l'un des moins bons albums du groupe, mais à le comparer avec les autres albums de 1989, nul doute qu'il n'était pas aussi détestable que cela...
9. I Don't Know That You Don't Know My Name
Issu de Ssssh (1969)
L'enchainement avec Goin' To Chicago a été pour moi, un réel supplice. La qualité de production de 1989 étant ce qu'elle est, prendre n'importe quelle autre titre pour l'enchainer relevait de l'inévitable défi auditif. L'intro acoustique de ce morceau m'a donc permis de ne pas trop rendre l'enchainement outrancier. Un très court titre, d'une légèreté printanière, dont la qualité d'écriture est à rapprocher de Portable People.
10. Working On The Road
Issu de Cricklewood Green (1970)
J'ADORE ce titre ! Son intro si reconnaissable, son rythme très équin, son refrain si bien vu (et pourtant si, à première vue, inadapté au corps du titre) et sa cadence bien emmenée (qui sera même accélérée en live). Working On The Road est, pour moi, un des plus grands sommets de Ten Years After
11. Speed Kills
Issu de Stonedhenge (1968)
Un titre qui a certes un poil vieilli au regard des autres titres de la sélection. Il emboite parfaitement le pas à Working On The Road, comme si - OUI ! - on pouvait aller encore plus vite.
12. I'm Goin' Home (Live In Woodstock)
Issu de Woodstock 40 (Various Artists 1969/2009)
Plus vite ? Oui, Alvin l'a toujours pu. Comment aurait-je pu faire cette compilation sans inclure ce monument. Ce titre qui a fait la gloire de Ten Years After et surtout de son frontman. Quelle impressionnante prestation (regardez-la en vidéo si vous ne l'avez jamais vu, c'est juste impressionnant de maitrise et d'entrain : étonnamment, scéniquement, c'est Leo Lyons qui impressionne le plus avec son jeu de basse si caractéristique. Je me suis toujours contraint de rester dans le cadre strict de l'enregistrement studio, mais dans le cas présent c'était purement et clairement impossible : le single était lui-même enregistré en live et n'avait clairement pas la même empreinte que cette version-ci qu'Alvin Lee ne surpassera jamais, ne faisant que de tenter de le rejouer à l'identique...
13. One Of These Days
Issu de A Space In Time (1971)
Un peu plus terre-à-terre que I'm Going Home (en même temps, ...) ce titre reste néanmoins un des morceaux marquants du groupe, qui s'aventure assez peu, finalement, dans un blues pur. Celui-ci est d'ailleurs édulcoré par un rock low-tempo du meilleur effet.
14. Love Like A Man
Issu de Cricklewood Green (1970)
Encore un titre majeur. Reconnaissable par son riff si inédit. Le single aura la particularité de réunir deux versions de ce titre, l'une en studio (la même version que sur l'album) et l'autre en live (enregistré au Fillmore en 1970). Bien plus longue (8 minutes), cette version live se jouait, sur la face B de ce 45 tours à la vitesse d'un 33 tours !
CD II
1. Over The Hill
Issu de A Space In Time (1971)
Unique morceau du groupe où joue un quatuor à cordes. On ne peut pas dire que Ten Years After était un groupe symphonique mais, par ce titre, ils montrent qu'ils auraient pu en chatouiller le projet
2. You Give Me Loving
Issu de Rock'n'Roll Music To The World (1972)
Le titre d'ouverture de l'album Rock'n'Roll Music To The World montre une nouvelle direction artistique du groupe. Changement très peu radical mais qui a fait s'éloigner certains fans de la première heure de l'actualité du groupe. Eux voulaient probablement encore plus de guitare, Lee, lui, a voulu se focaliser avant tout sur la composition. Sage décision à mon avis. Peut-être n'ont-il pas non plus apprécié l'arrivé du synthétiseur... Même si TYA est un groupe de Rock / Blues-Rock, ils ont eu quelques passage plus Jazzies (notamment l'album live Undead). Le présent titre présente lui aussi une échappé Jazzie.
3. A Hundred Miles High
Issu de Ten Years After Now (2004)
Titre de la période Gooch qui n'est pas sans évoquer, par ses sonorités, un titre comme Pride And Joy (de Coverdale/Page) et par ses ambiance, étonnamment, plus aux Strange Sensation de Robert Plant (pour les passages calmes) ou encore une fois, à Joe Bonamassa.
4. Positive Vibrations
Issu de Positive Vibrations (1974)
Positive Vibrations a été longtemps oublié des rééditions CD. Certes moins bon, il ne manque cependant pas d'intérêt. L'ambiance dans le studio était plutôt à la castagne, ce qui explique un moins grand engouement pour la composition et, donc, des titres moins aboutis. L'album dans son ensemble reste bon, mais difficile d'en sortir un titre qui tienne à lui seul la route. Le titre éponyme joue très bien ce rôle.
5. Two Time Mama
Issu de Ssssh (1969)
La bande à Lee est coutumière de ces titres légers mais à l'impact certain. On en a déjà vu depuis le début de ce Baistophe. Il ne fait donc pas exception.
6. I'm Coming Home
Issu de Watt (1970)
Il y a quelque chose qui me dérange dans Watt : il est au centre de la golden era du groupe (1969-1972) et pourtant, il peine à mériter sa place dans cette ère. Très inégal, il oscille entre l'excellent et l'anecdotique (ce dont ne souffrent pas les autres albums, plus homogènes). I'm Coming Home tient, lui, le haut du pavé.
7. Help Me
Issu de Ten Years After (1967)
Au même titre que No Title ou Hear Me Calling, Help Me est un blues lourd et progressif d'une puissance que les deux autres n'égalent que rarement.
8. Hear Me Calling
Titre de Stonedhenge (1968) version single issue de Alvin Lee & Co (1972)
Hear Me Calling, justement, s'enchaine parfaitement avec Help Me. Malgré quelques similarités, ils sont clairement différents. Un titre qui prend toute sa puissance en live. Slade en a fait une excellent version, justement, sur leur album Alive !
9. I'd Love To Change The World
Issu de A Space In Time (1971)
A lire les paroles des chansons de Ten Years After, on remarque aisément que l'engagement politique n'est pas de mise, notamment sur un point de vue artistique. Exception faite de I'd Love To Change The World, délicieusement naïf et utopique, mais si excellemment orchestré.
10. Standing At The Station
Issu de Rock'n'Roll Music To The World (1972)
Assurément mon titre préféré de l'album d'où il est tiré. Superberment construit autour d'une évolution inexorable vers des hautes sphères. Flirtant presque, même, avec le Space Rock, son passage rapide est des plus efficaces.
11. As The Sun Still Burns Away
Issu de Cricklewood Green (1970)
Un titre qui souffre un peu trop de la comparaison avec Love Like A Man par la ressemblance entre leur riff respectif. Pourtant, la construction, elle aussi, sur une simple montée en puissance en fait un titre, à mon goût incontournable.
12. I Can't Keep From Cryin' Sometimes (incl. Extension On One Chord) Live In Frankfurter
Westfallenhalle
Issu de Recorded Live (1973). Version studio disponible sur Ten Years After (1967)
Si vous avez aimé I'm Going Home, attendez vous à être complètement bluffé par ce titre. Là aussi, j'ai fait une entorse sur le "no-live", mais il le fallait. D'une part parce que la version studio (de 1967) a pris nettement de l'âge, et d'autre part, ce titre brille avant tout par la longue improvisation mi-Jazz, mi-Jam qui dure plus de 10 minutes. Alvin Lee y torture sa guitare et montre la totalité de ses talents de guitariste, pas seulement sa vélocité. Le premier solo est joué sur un unique accord. Le second, plus dans une veine Jazzy, prépare ce qui va suivre, entre torturage de cordes, taping du meilleur effet et autre clin d’œil à d'autre standards du Rock, comme c'était déjà le cas sur I'm Going Home. Puis, il dérègle sa corde la plus grave pour faire descendre les notes dans les plus profondes abysses, opérant, ainsi, pour un retour à la normal, la plus impressionnante montée en puissance jamais entendue dans l'histoire du Rock.
13. I've Been There Too
Issu de A Space In Time (1971)
Après une telle tempête, il était bon de clore le Baistophe de Ten Years After par quelque chose de calme. En partie calme, cependant, car le refrain réveille, lui, un peu l'ardeur des musiciens. Un peu seulement : il fallait finir en douceur.
EN STUDIO
1. A Space In Time (1971) - 4.5/5
2. Cricklewood Green (1970) - 4/5
3. Rock'n'Roll Music To The World (1972) - 4/5
4. Ssssh (1969) - 3.5/5
5. Stonedhenge (1968) - 3.5/5
6. Watt (1970) - 3/5
7. Alvin Lee & Co (1972) - 3/5
8. Ten Years After (1967) - 3/5
9. Evolution (2008) - 3/5
10. Positive Vibrations (1974) - 2.5/5
11. Ten Years After Now (2004) - 2.5/5
12. About Time (1989) - 2/5
EN LIVE
1. Recorded Live (1973) - 4.5/5
2. Live At Fillmore East 1970 (2003) - 4/5
3. Live At Reading 1983 (1990) - 3.5/5
4. Roadworks (2005) - 3.5/5
5. One Night Jammed (2003) - 3/5
6. Undead (1968) - 2.5/5
7. Live 1990 (1993) - 2/5
CETTE COMPILATION N'ÉTANT PAS OFFICIELLE VOUS POUVEZ NÉANMOINS ACHETER (SI VOUS VOULEZ EN RESTER À UNE COMPIL') :
Étonnamment, Très peu de compilations sont convaincante et, évidemment, quasiment aucune ne recouvre les deux époque (Deram 1967-1969 et Chrysalis 1969-1974), et toutes s'arrêtent au premier split (ça c'est moins étonnant). Les sélections, elles, sont encore plus surprenantes, occultant systématiquement des titres essentiels, probablement à cause de leur longueur. Néanmoins, si, la mort dans l'âme, vous vouliez absolument avoir une compilation officielle de Ten Years After, la moins pire serait The Essential, sortie en 1991, mais, même elle, je la trouve peu convaincante. À la rigueur, si vous voulez un excellent Best Of, prenez un live, et le meilleur, vous ne serez pas déçus.
EN ÉCOUTE :